« Je suis né et j’ai grandi en Malaisie. J’ai étudié la philosophie à Singapour. J’ai ensuite travaillé à Hong Kong puis à Shanghai, avant de retourner vivre à Hong Kong. Je suis consultant en gestion, et ma carrière professionnelle m’a emmené dans de très nombreux pays et dans différentes villes. Nombre de mes clients sont des entreprises françaises du luxe, c’est pourquoi je passe beaucoup de temps à Paris. »
« J’ai commencé à collectionner lorsque je me suis installé à Hong Kong, en 1999. C’était avant l’arrivée d’Art Basel, avant la création de M+ ou de toute autre institution, avant la première inauguration d’une galerie internationale… Les seuls lieux où nous pouvions alors voir de l’art contemporain international étaient les maisons de vente. C’est également à cette époque que j’ai rencontré mon ami, avec qui je partage une passion pour l’art. Notre collection a en quelque sorte démarré comme une histoire d’amour. Elle est aussi profondément liée à Hong Kong, où de plus en plus d’art commençait à être exposé, d’abord chinois puis international, et qui jouait un rôle de plus en plus important pour l’art contemporain dans cette région du monde. Aujourd’hui, je considère notre collection comme étant particulièrement représentative de Hong Kong, de cette histoire et de ses développements. »
« Je me suis éduqué à l’art en regardant, en explorant et en ayant des discussions. Ce qui est rapidement devenu primordial pour moi était les relations que je construisais avec des galeristes. Ceux∙elles-ci font partie intégrante de l’écosystème de l’art, avec les artistes et les œuvres. Pour moi, c’est ce système dans son ensemble qui a la capacité de faire qu’une œuvre devienne importante. Bien souvent, lorsqu’une pièce m’intéresse, la galerie de l’artiste y est pour beaucoup. Je veux donc connaître son programme, sa philosophie, etc., parce que je suis convaincu que tout cela ajoute quelque chose à l’œuvre et au travail de l’artiste. »
« J’ai construit ma collection en développant des conversations – et, très souvent, de profondes amitiés – avec des galeristes. J’ai notamment rencontré Leo Xu [directeur de David Zwirner à Hong Kong] en 2011, lorsque je me suis installé à Shanghai, où j’ai vécu quatre ans et demi. Il dirigeait alors un lieu d’art contemporain appelé Leo Xu Projects. Tandis qu’en Chine, l’obsession du moment allait aux artistes chinois∙es, il exposait de nombreux artistes internationaux∙ales tels que Danh Vō, Wolfgang Tillmans ou Nina Canell. Il est rapidement devenu une figure importante pour moi, à la fois un mentor, un conseiller en art et un ami. Grâce à lui, j’ai commencé à collectionner des œuvres de Guo Hongwei, Chen Wei, He An et Sun Xun. Il m’a également permis de rencontrer de nombreux∙ses curateur∙rice∙s, galeristes et collectionneur∙euse∙s. La façon dont Leo interagissait avec l’art, les artistes et le milieu de l’art m’a très vite amené à réfléchir à ma propre méthodologie pour collectionner. J’ai alors commencé à voir les œuvres moins comme des objets que comme des relations. Sous l’influence de Leo Xu, ma collection a évolué de la peinture vers l’art conceptuel. »
« Plus tard, j’ai rencontré Jan Mot, car j’étais intéressé par Tino Sehgal, et j’ai découvert un autre exemple d’esprit indépendant aux points de vue uniques sur l’art qui me passionnent tant. J’adore le programme de sa galerie, et je collectionne nombre de ses artistes que j’ai, grâce à lui, la chance de connaître personnellement. Ma collection est devenue encore plus conceptuelle ces dernières années, et de nombreuses autres galeries ont pris de l’importance pour moi : Vitamin Creative Space en Chine, Blindspot Gallery à Hong Kong, Taro Nasu au Japon, Experimenter en Inde, Proyectos Ultravioleta au Guatemala, Barbara Wien en Allemagne, Chantal Crousel et Balice Hertling en France, parmi tant d’autres. J’ai rencontré Barbara Wien par l’intermédiaire de Haegue Yang et elle m’a fait découvrir le travail de Daniel Lie. J’ai découvert l’œuvre de Jitish Kallat à la galerie Chemould Prescott Road de Mumbai et Ser Serpas chez Balice Hertling à Paris… Une relation me mène constamment à une autre. »
« Pendant la pandémie de Covid-19, j’ai pris conscience que je voulais aussi vivre en Malaisie et je me suis alors installé à George Town, la capitale de l’État de Penang. Depuis, je divise principalement mon temps entre Paris et George Town, où j’ai inauguré en 2022 un espace indépendant d’art contemporain que j’ai appelé Blank Canvas. »
« Je voyage constamment, et je suis très impliqué dans de multiples conversations internationales. À l’inverse, la Malaisie reste déconnectée du reste du monde et il ne s’y passe pas encore grand-chose. C’est pour cela que j’ai créé Blank Canvas, pour partager ma passion de l’art contemporain avec mon pays. Aujourd’hui, je ne collectionne plus uniquement pour moi-même, je poursuis un but qui va au-delà de ma passion et je ressens une plus grande responsabilité. »
« Blank Canvas est un espace expérimental indépendant avec lequel nous cherchons simultanément à sensibiliser les publics et à susciter un plus grand intérêt pour l’art contemporain local et international. Nous encourageons des artistes internationaux∙ales à découvrir et à se mesurer à l’extraordinaire richesse historique et multiculturelle de la ville de George Town et de toute la région de Penang. Nous gérons à la fois un lieu d’exposition et une résidence d’artiste. En 2022, notre premier artiste en résidence a été Trevor Yeung, qui représentera Hong Kong à la Biennale de Venise 2024. Nous avons également exposé Heman Chong, Ryan Gander, Tino Sehgal, Shooshie Sulaiman, Danh Vō, Haegue Yang, etc. La prochaine exposition sera organisée part Christina Li, qui était commissaire en résidence chez nous en 2023. Pour moi, Blank Canvas est une autre manière de collectionner. »