La réouverture de Notre-Dame de Paris a captivé l’attention à travers le monde, soulignant son importance profonde bien au-delà des frontières de la France. Lorsque son toit a été ravagé par un incendie en avril 2019, le pays était en deuil. Le projet ambitieux du président Emmanuel Macron de la rouvrir dans ce court laps de temps n’était pas seulement une promesse au peuple français : c’était une promesse au monde entier. Alors que les portes de la cathédrale s'ouvrent à nouveau, voici cinq faits remarquables qui témoignent de son histoire extraordinaire - et de son avenir.
Un symbole non seulement religieux, mais national
Si Notre-Dame est un immense symbole de la foi chrétienne, elle a également servi de lieu de rituel républicain, comme lorsque l’empereur Napoléon Ier y a été couronné en 1804 ou que ses cloches ont sonné la libération de Paris en 1944. « L’édifice est complètement immergé dans l’histoire nationale et parisienne ; de grands événements s’y sont déroulés depuis l’époque médiévale », explique Jean-Michel Leniaud, historien de l’art et président de la Société des Amis de Notre-Dame de Paris.
L’édifice lui-même porte les stigmates de l’histoire de France. Par exemple, pendant la Révolution française, les statues en pierre des rois bibliques de Juda qui bordaient sa façade ouest ont été décapitées. Les têtes manquantes n’ont été retrouvées que dans les années 1970, dans les fondations d’un chantier, et sont aujourd’hui exposées au musée de Cluny, situé à proximité.
Le roman de Victor Hugo a inspiré une partie de l’architecture de la cathédrale
Notre-Dame est considérée comme un chef d’œuvre de l’architecture gothique médiévale. Mais elle a été mutilée, endommagée puis restaurée dans un patchwork de styles au cours des siècles, notamment de 1843 à 1864, lorsqu’Eugène Viollet-le-Duc a été chargé de la restaurer. L’architecte s’est directement inspiré de la description de la cathédrale par Victor Hugo pour une partie de ses projets. Alors que certaines gargouilles datent du 18e siècle et avaient pour fonction pratique de détourner l’eau de pluie des murs de pierre afin d’en prévenir l’érosion, il a ajouté les chimères ornementales ou grotesques qui veillent sur la cathédrale. Et si vous visitez l’édifice, vous verrez Viollet-Le-Duc lui-même : il a « signé » son œuvre en prêtant son visage à la statue de saint Thomas, au pied de la flèche.
Des vitraux contemporains
De nombreux présidents français ont laissé un héritage physique sous la forme de projets culturels. François Mitterrand a commandé la pyramide emblématique du Louvre, Beaubourg est né sous l’impulsion de Georges Pompidou, Jacques Chirac a initié le musée du quai Branly. Et pour Emmanuel Macron, il s’agirait de laisser sa marque sur l’un des plus grands monuments de Paris : Notre-Dame. Bien que les vitraux de la cathédrale, conçus par Viollet-le-Duc, n’aient pas été endommagés par l’incendie, le président a annoncé en décembre 2023 que certains d’entre eux seraient remplacés par des créations contemporaines. L’idée a suscité une vive réaction, dont une pétition qui a recueilli, à ce jour, quelque 270 000 signatures : « Qui a donné mandat au chef de l’État d’altérer une cathédrale qui ne lui appartient pas en propre, mais à tous ? », demande-t-elle notamment. Un appel à candidatures a tout de même été lancé au début de l’année 2024, et l’artiste française Claire Tabouret a été choisie en décembre par le comité artistique spécial présidé par Bernard Blistène, ancien directeur du Musée national d’art moderne au centre Pompidou. Son projet, aux teintes vibrantes de turquoise, de jaune, de rose et de rouge, représente des groupes de personnes en prière, symbolisant l’unité et l’espoir. Pour ce projet, Claire Tabouret a travaillé avec l’atelier de maîtres-verriers rémois Simon-Marq. Les nouveaux vitraux devraient être installés en 2026.
Des trésors archéologiques
La restauration de la cathédrale a été l’occasion de mener des fouilles. Elles ont notamment permis de découvrir des fragments de sculptures provenant de l’ancien jubé, la cloison ornée qui séparait le chœur de la nef. Certains portaient encore des traces de polychromie datant de 1230 – une découverte notable. Mais le site n’a pas été exploré dans sa totalité. « La décision a été prise de ne pas fouiller l’ensemble du lieu, ce qui a agacé les archéologues ! Mais je pense que c’était une bonne chose. Cela aurait pris infiniment plus de temps, la cathédrale aurait été fermée pendant des décennies », explique Jean-Michel Leniaud. « Et cela permettra de terminer les fouilles dans 50 ans, quand nous aurons des techniques encore plus performantes et que nous pourrons mieux travailler. »
Une forêt intérieure
Le sinistre incendie du 15 avril 2019 s’est déclaré dans les combles de la cathédrale, quadrillés par plus de 1 300 pièces de bois datant du début de la construction de l’édifice, au 13e siècle. Chacune de ces poutres a été fabriquée à partir d’un arbre individuel, ce qui a valu à cet espace son surnom de « forêt ». Cette technique médiévale de travail du bois vert, fraîchement abattu, a failli disparaître en France avant qu’une association, Charpentiers sans Frontières (CsF), ne la remette au goût du jour dans les années 1990 – même si, aujourd’hui, les charpentier·ère·s qui maîtrisent ce savoir-faire restent rares. Ces dernier·ère·s ont également dû chercher, dans tout le pays, 1 300 chênes à l’aspect et à la composition aussi proches que possible de ceux utilisés il y a 800 ans.