Une toute nouvelle génération de collectionneur∙euse∙s d’art émerge à toute allure un peu partout dans le monde. Art Basel Stories révèle tout ce que vous devez savoir sur une première acquisition, notamment grâce aux conseils éclairés de Rongda Wei de la galerie Asia Art Center, basée à Taiwan et participant à Art Basel Hong Kong ; de la collectionneuse Ellie Huang, qui a effectué son premier achat à la foire en 2024 ; et de la directrice de la foire, Angelle Siyang-Le.

« C’est ma première fois à Art Basel Hong Kong. Par où commencer ? »

Il est préférable d’avoir un plan et de vous documenter – ce qui est généralement un exercice assez stimulant. « Les grandes manifestations comme Art Basel Hong Kong peuvent être étourdissantes ; il est donc essentiel de préparer sa venue. Collecter des informations sur la foire avant de s’y rendre est indispensable : passez en revue la liste des galeries et des artistes participant∙e∙s, notez la programmation d’événements ou les œuvres présentées, et définissez un itinéraire qui couvre les stands incontournables tout en laissant une place aux découvertes inattendues », conseille Rongda Wei. Les visiteur∙euse∙s néophytes ont tout intérêt à prévoir plusieurs jours pour pouvoir prendre vraiment leur temps, former leur regard, s’imprégner de l’ambiance et avoir une vue d’ensemble sur les œuvres proposées.

Autre conseil utile : n'oubliez pas vous n’êtes pas seul∙e à vous sentir submergé∙e par la surcharge visuelle (tant de pièces formidables, tant de gens, tant d’informations !) : « Même les professionnel∙le∙s se perdent parfois dans la foire, malgré le soin apporté à la signalétique », reconnaît Angelle Siyang-Le. Elle recommande aux nouveaux∙elle∙s collectionneur∙euse∙s de cibler les secteurs qui pourraient les intéresser : « Cela vous aidera à vous concentrer sur ce que vous aimeriez voir. Par exemple, le secteur Insights, pour les artistes de la région Asie-Pacifique, fournit un contexte historique pour cette partie du monde. Et si votre objectif est de soutenir les talents émergents, Discoveries est incontournable. »

Si Ellie Huang avait l’habitude de se concentrer sur les stands de galeries réputées, comme Pace Gallery ou David Zwirner, elle a récemment exercé son regard sur ce que présentaient des espaces plus confidentiels, s’intéressant à leur lieu d’origine et à l’histoire de la région. Elle continue de passer plusieurs jours à arpenter les allées de Art Basel Hong Kong, et l’année dernière, elle a acheté sa première œuvre – repérée dans l’arrière-salle d’un stand – lors du week-end de clôture de la foire.

« Je n’ai jamais acheté d’œuvre d’art, mais j’aimerais développer mon goût et apprendre le plus possible tout en constituant une collection. Comment débuter ? »

Le vieil adage selon lequel « savoir, c’est pouvoir » s’applique également au monde et au marché de l’art. Organisez-vous pour fréquenter le plus de galeries et de musées possible ; consultez les catalogues d’exposition et lisez des magazines d’art ; et, bien sûr, visitez des foires.

La première acquisition d’une œuvre d’art peut être angoissante, mais construire votre regard et voir votre nouvelle collection évoluer se révèle extrêmement gratifiant. D’abord, observez comment vous raisonnez et questionnez vos motivations. « Nous encourageons celles et ceux qui ont déjà une certaine compréhension de l’art à faire confiance à leur expérience esthétique et à leur instinct. Il∙elle∙s peuvent commencer par collectionner des œuvres qu’il∙elle∙s apprécient réellement et qui se situent dans leur zone de confort financier », explique Rongda Wei.

C’est ce qu’a fait Ellie Huang : la jeune femme de 27 ans a grandi avec la collection d’art de sa mère, mais a également passé plusieurs années à New York à fréquenter foires et galeries, aiguisant ainsi son goût. « Pour celles et ceux qui sont encore en train de se former à l’art, il peut être constructif de demander conseil à des collectionneur∙euse∙s expérimenté∙e∙s ou à des art advisors », souligne Rongda Wei.

Pour Angelle Siyang-Le, l’important est de se faire confiance : « Achetez avec vos yeux et non avec vos oreilles ! Cela vaut en particulier pour les acheteur∙euse∙s plus jeunes : dirigez-vous vers ce qui résonne en vous et non parce qu’on vous dit que c’est bien. »

« Qu’est-ce que je ne dois pas faire ? »

N’achetez pas sur un coup de tête. Sortez des sentiers battus et ne pensez pas trop à l’avenir. « Ne vous précipitez pas sur une pièce en vous basant uniquement sur les tendances du marché ou le potentiel d’investissement éventuel. Collectionner devrait surtout être une question de passion, de connexion avec une œuvre, pas seulement de spéculation financière », rappelle Wei Rongda.

« Je suis tombé amoureux∙euse d’une œuvre, mais elle dépasse mon budget. Puis-je la payer en plusieurs fois ? »

N’ayez pas peur d’insister pour obtenir ce que vous aimez : acheter une pièce parfaite, mais chère, est souvent envisageable. « On ne le sait pas toujours, mais les galeries proposent souvent des solutions de paiement », dit Rongda Wei. Cela peut être un règlement échelonné, voire une remise. « Dans certains cas, elles peuvent faire un geste pour encourager une première acquisition, sachant que cela dépend toujours des particularités de chaque transaction. Le plus important est d’établir une relation de confiance et de s’assurer que le∙la collectionneur∙euse assume sa décision. »

« Est-ce une bonne idée d’acheter plusieurs œuvres d’une même galerie ou d’un∙e même artiste ? »

Suivre et soutenir la carrière de quelqu’un au fil du temps peut se révéler extrêmement gratifiant, comme il est tout aussi agréable de cultiver une relation durable avec une galerie. Mais collectionner plusieurs œuvres d’un∙e même artiste « dépend de la vision à long terme du∙de la collectionneur∙euse », selon Rongda Wei. « Si il∙elle se sent profondément connecté∙e à son travail et souhaite suivre son évolution, acquérir plusieurs pièces peut avoir du sens. Mais les collectionneur∙euse∙s émergent∙e∙s ont également intérêt à diversifier leurs achats pour développer une compréhension plus large des différents styles et récits de l’art contemporain. » Commencez par rester ouvert∙e aux nouvelles découvertes, sans pour autant oublier vos premières amours. Ellie Huang garde toujours un œil sur les artistes vivant∙e∙s qu’elle collectionne actuellement pour suivre leurs nouvelles productions, par exemple.

« J’ai acheté une œuvre à Art Basel Hong Kong. Comment la ramener chez moi ? »

« La plupart du temps, l’expédition est à discuter avec le∙la galeriste. Partout dans le monde, il existe d’excellents spécialistes du transport d’art, avec ses spécificités, comme le contrôle thermique et l’assurance. « Si l’œuvre doit être envoyée à l’étranger, nous expliquons à l’acheteur∙euse les différentes réglementations fiscales d’importation des pays de transit pour s’assurer qu’il∙elle est suffisamment informé∙e avant de conclure la vente », précise Rongda Wei.

Si l’œuvre est de petit format et constituée de matériaux adaptés et durables, on peut la ramener avec soi (muni∙e des formulaires douaniers nécessaires, bien sûr). Dans ce cas, assure Rongda Wei, la plupart des galeries, y compris Asia Art Center, veillent à ce qu’elle soit correctement emballée et assurée avant de laisser un∙e collectionneur∙euse la transporter lui∙elle-même. Ellie Huang apprécie d’acheter de l’art à Art Basel Hong Kong parce que c’est proche de son domicile (ce qui signifie également que si une pièce l’intéresse, elle doit se décider rapidement puisque les œuvres invendues partent avec leur galerie à la fin de la foire). En outre, le transport d’art recourt parfois à des solutions créatives : retirer une peinture de son cadre et la transporter enroulée dans un tube, avant de la faire tendre sur un nouveau cadre sur mesure par un∙e professionnel∙le, par exemple, n’est pas rare. Si nécessaire, la plupart des galeries fourniront également une solution de stockage temporaire pour les œuvres.

« Et si je n’arrive pas à me décider pour une œuvre ? »

L’indécision est normale et très fréquente. « Nous encourageons souvent les nouveaux∙elles collectionneur∙euse∙s à réfléchir à la raison pour laquelle une pièce particulière leur parle », commente Rongda Wei. « Suscite-t-elle des émotions ou des pensées particulièrement fortes ? L’apprécieront-il∙elle∙s encore dans quelques années ? S’ils∙elles sont toujours indécis∙es, nous leur suggérons de prendre le temps de revoir l’œuvre et de la comparer avec d’autres choix. Mais si une œuvre résonne profondément en eux∙elles, mieux vaut agir rapidement avant qu’elle ne soit acquise par quelqu’un d’autre. » Pour son tout premier achat l’année dernière, Ellie Huang était sûre d’elle : « J’ai vraiment ressenti un lien très fort avec cette œuvre. » Elle l’a remarquée le deuxième jour de sa visite d’Art Basel Hong Kong 2024. Après avoir discuté avec le∙la galeriste, appris l’histoire de la pièce et de l’artiste, et sur le prix, elle est passé à l’action.

« J’aimerais acheter une œuvre, mais quelqu’un d’autre aussi. Que dois-je faire ? »

Il est en général possible de réserver une œuvre en déposant un acompte. « Si un∙e collectionneur∙euse exprime juste son intérêt mais retarde la finalisation de l’achat, nous prendrons acte de son intention et lui rappellerons que d’autres collectionneur∙euse∙s convoitent la pièce. Si il∙elle est vraiment intéressé∙e, il∙elle doit nous en faire part clairement, puis prendre sa décision à temps », avertit Rongda Wei.

« Comment rencontrer d’autres collectionneur∙euse∙s ? »

Devenir collectionneur∙euse d’art, c’est aussi la possibilité de rejoindre une communauté internationale particulièrement dynamique : participez aux programmes VIP d’Art Basel, entretenez le contact avec des galeries dont vous appréciez la programmation (vous rencontrerez inévitablement d’autres collectionneur∙euse∙s lors d’événements) et cherchez des groupes de collectionneur∙euse∙s indépendant∙e∙s dans votre région (sinon, créez-en un vous-même !).

Pendant les jours les plus denses d’Art Basel Hong Kong, n’hésitez pas à assister aux nombreux évènements qui se déroulent hors les murs : « Nous sommes un point de rencontre non seulement pour les professionnel∙le∙s, mais aussi pour les aficionado∙a∙s de l’art et le monde culturel au sens large », souligne Angelle Siyang-Le. « Depuis la pandémie de Covid-19 en particulier, nous nouons des liens avec des industries créatives à travers différents médiums et formats artistiques : sur la foire mais aussi au-delà, comme par exemple lors de notre collaboration avec l’Artists’ Night du Tai Kwun, à Hong Kong. C’est un nouvel évènement qui attire à la fois des collectionneur∙euse∙s chevronné∙e∙s et émergent∙e∙s. À cette occasion et lors d’autres évènements, nous pouvons présenter des pratiques artistiques qui vont au-delà de ce que vous voyez à la foire. »