Trente nouvelles galeries du monde entier feront leurs débuts dans le secteur Galeries d’Art Basel Paris, dont l’édition 2024 se tiendra dans le mythique Grand Palais. Le programme sera riche : d’une exploration de la jeune scène saoudienne à un solo floral de Jill Magid, en passant par des résonnances à l’actualité muséale parisienne via le surréalisme ou l’arte povera.


ATHR, Riyad, AlUla, Djeddah

La galerie ATHR a été fondée en 2009 à Djeddah, en Arabie saoudite. En écho à une jeune scène artistique en plein essor, la galerie entendait prêter main forte à la présence encore timide des musées. Aujourd’hui, ATHR dispose de deux autres espaces à AlUla et Riyad. À Art Basel Paris, la galerie met en lumière quatre jeunes artistes basé·e·s dans le pays : Sara Abdu, Asma Bahmim, Mohammed AlFaraj et Muhannad Shono. Chacun·e ont récemment marqué l’actualité artistique, avec notamment la participation des deux premières à la deuxième édition de la Biennale de Diriyah. Un trait récurrent chez tou·te·s concerne la charge narrative des matériaux utilisés : des savonnettes ou des grains de sable éveillent des récits à la fois mythiques et modernes, évoquant le deuil, la réinvention ou les cycles de la vie.

Di Donna, New York

En 2024, le surréalisme a 100 ans et les hommages se multiplient. Cependant, ils ne sont nulle part aussi vibrants qu’à Paris, berceau du mouvement. Di Donna l’a bien compris, et pour sa participation à Art Basel Paris, la galerie new-yorkaise a peaufiné une présentation sur mesure. « Terre sacrée : Tanguy, Lam, Penalba et Cárdenas » a tout d’une exposition muséale et rassemble quatre artistes historiques qui eurent en commun de participer à l’aventure : un Breton (Yves Tanguy), deux Cubains (Wilfredo Lam, Agustín Cárdenas) et une Argentine (Alicia Penalba), qui, tou·te·s, ont quitté leur contrée natale pour tenter leur chance à Paris.

Goodman Gallery, Le Cap, Johannesburg, Londres, New York

David Goldblatt, William Kentridge et El Anatsui font partie des grands maîtres de notre époque. Leur visibilité actuelle atteste de la place désormais incontournable des artistes issu·e·s du continent africain et raconte l’ascension de leur galerie historique : Goodman Gallery. Fondée en 1966 à Johnannesburg, celle-ci possède à présent des espaces au Cap, à Londres et à New York. On la retrouve pour la première fois cette année à Art Basel Paris, où elle porte le flambeau des galeries du continent africain. Son stand mettra en avant des clichés documentaires du sud-africain David Goldblatt (disparu en 2018), un cheval en bronze de son compatriote et maître-conteur William Kentridge, ou encore l’une des fameuses pièces murales aux mille morceaux en métal du ghanéen El Anatsui. La plus jeune génération dialogue avec les mastodontes par l’entremise de Kapwani Kiwanga, parisienne d’adoption, qui représente actuellement le Canada à la 60e Biennale d’Art de Venise.

Labor, Mexico

Cet été, Labor fêtait ses 15 ans. La galerie s’est distinguée par son accompagnement d’artistes inscrit·e·s dans un processus de recherche à long terme, à l’instar d’Irene Kopelman, de Pedro Reyes ou de Santiago Sierra. L’artiste conceptuelle américaine Jill Magid en fait partie, reflétant des thématiques chères à la galerie comme le travail, les structures de pouvoir ou l’extractivisme. Pour son solo avec Labor à Art Basel Paris, l’artiste explore la manipulation biologique des fleurs par des humain·e·s désireux·ses d’en augmenter la valeur. Pour cela, Jill Magid emplit l’espace de fleurs fraîches provenant du plus grand marché de fleurs de Paris tout en y adjoignant d’autres « fleurs » réalisées en néon — les formules mathématiques de roses ou de chrysanthèmes bio-hackés. 

Misako & Rosen, Tokyo

Dès le début, la galerie Misako & Rosen a voulu faire connaître l’art contemporain japonais à l’étranger. Puis une seconde philosophie s’y est superposée : développer des dynamiques coopératives au sein du monde de l’art. Lors de sa participation à Art Basel Paris, Misako & Rosen présente quatre artistes japonais·e·s, Naotaka Hiro, Reina Sugihara, Motoyuki Daifu et Trevor Shimizu, dans le cadre d’une présentation conjointe avec la galerie LambdaLambdaLambda, basée à Pristina. Si les deux galeries ont déjà allié leurs forces par le passé, elles se préparent surtout à ouvrir un espace commercial partagé à Paris cette année.

Lia Rumma, Milan, Naples

Dès les années 1960, un jeune couple de collectionneur·euse·s, Lia et Marcello Rumma, s’était déjà fait un nom en présentant des expositions, événements et publications faisant la part belle à un jeune mouvement en pleine ascension : l’arte povera. Puis, en 1971, la galerie Lia Rumma ouvrait ses portes à Naples avec une exposition de Joseph Kosuth – qu’elle représente toujours. Possédant des espaces à Naples et à Milan, la galerie a accompagné l’essor de la plupart des grands mouvements contemporains – art minimal, land art ou art conceptuel. La galerie continue d’accompagner des artistes de premier plan et représente notamment Michelangelo Pistoletto et Haim Steinbach.


Sprovieri, Londres

Le nom italien de Sprovieri évoque sa riche histoire transfrontalière. L’actuelle galerie a été fondée à Londres en 2000 tout en héritant d’un passé familial initié à Rome en 1913. Aujourd’hui, elle représente des artistes internationaux·ales de premier ordre, dont Pedro Cabrita Reis, Jimmie Durham ou la succession de Jannis Kounellis. Simultanément, Sprovieri a conservé un ancrage dans l’art d’après-guerre italien, comme en témoigne l’exposition estivale consacrée à Emilio Prini, représentant italien de l’arte povera disparu en 2016 – le même qui, durant Art Basel Paris, sera exposé au sein de l’exposition « Arte Povera » à la Bourse de Commerce - Pinault Collection.

Vitamin Creative Space, Beijing, Guangzhou

Récemment, Shao Fan a peint des lapins. Il a tracé chaque poil de leur pelage ou plongé leur silhouette dans une brume vaporeuse. La série en grisaille « In the Name of the Rabbit », entreprise en 2020, était exposée à Vitamin Creative Space (Guangzhou) au printemps dernier. Quel que soit le sujet, la pratique de l’artiste chinois né en 1964 conserve son caractère répétitif : menée à l’encre ou à l’huile, sur papier de riz ou sur soie, c’est d’une profonde méditation dont il s’agit. À Paris, Vitamin Creative Space présente Shao Fan en solo pour veiller à retranscrire cette qualité immersive. La galerie qui le représente a été fondée en 2002 et compte parmi ses artistes d’autres créateur·ice·s de mondes imaginaires : Cao Fei, Ólafur Elíasson, Firenze Lai ou Koki Tanaka.

Crédits et légendes

Art Basel Paris se tiendra du 18 au 20 octobre 2024. Plus d’informations ici.

Ingrid Luquet-Gad est critique d’art et doctorante basée à Paris. Elle enseigne la philosophie de l’art à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Légende de l’image en pleine page : Vue d’installation de l’exposition « For What it’s Worth: Value Systems in Art since 1960 », sous le commissariat de Tomas Feulmer & Lisa Le Feuvre à THE WAREHOUSE, Dallas, Texas, 2024. Oeuvres présentées : A Model for Cut Rose Stem Elongation Where y is 48 et A Model for Chrysantheum Stem Elongation Where y is 52 de Jill Magid. Photographie de Kevin Todora. © The Warehouse, Dallas.