À l’approche de l’édition 2025 d’Art Basel Hong Kong, nous avons parlé avec la directrice de la foire, Angelle Siyang-Le, des moments forts de cette année, des figures historiques de la scène artistique asiatique aux nouvelles collaborations hors site, des nouvelles orientations pour les collectionneur·euse·s – et, aussi, du meilleur endroit pour déguster des nouilles.

Art Basel : Quelles sont les nouveautés pour Art Basel Hong Kong en 2025 ? Les choses semblent profondément changer.

Angelle Siyang-Le : Pendant les « années de confinement » lié à la pandémie, nous avions perdu ce sens du collectif, que nous avons peu à peu retrouvé, mais nous voulons aller plus loin, en nouant des liens qui dépassent les frontières du monde de l’art, tel que nous l’envisagions auparavant. Nous bâtissons des ponts avec les univers des arts du spectacle, de la mode, de la musique, de l’architecture et du design. Plus qu’une simple foire d’art, nous voulons nous positionner au centre d’un écosystème culturel en Asie.

Comment l’écosystème artistique asiatique évolue-t-il ? Certaines régions seront-elles particulièrement mises à l’honneur cette année ?

L’Asie du Sud-Est aura une place de choix. C’est une région à part entière dont le contexte historique est extrêmement complexe, et c’est une mine à explorer, du point de vue de l’histoire de l’art. C’est un espace très dense, mais qui abrite une grande diversité de groupes ethniques et de langues. Nous accueillons notamment des galeries de Thaïlande, un pays dont la scène artistique est en plein essor, avec la Biennale d’art de Bangkok, de nouvelles institutions et des musées privés.

Mais Art Basel Hong Kong regarde au-delà de l’Asie, et vous accueillez également 23 nouvelles galeries internationales cette année.

L’Afrique sera particulièrement bien représentée, avec, parmi les galeries du Continent, blank projects, du Cap en Afrique du Sud. LambdaLambdaLambda, qui a participé à d’autres foires Art Basel, fait ses débuts à Hong Kong et est la première galerie du Kosovo à exposer ici.

J’ai remarqué que le secteur Kabinett de la foire, consacré à des expositions personnelles, et ce avec une approche curatoriale, est cette année le plus important jamais vu. Qu’est ce qui séduit particulièrement les galeries et collectionneur·euse·s dans ce type de propositions ?

Kabinett est un stand à l’intérieur d’un stand, et vous pouvez trouver ces présentations à travers l’ensemble de la foire. C’est l’occasion pour les galeries de mettre en lumière un·e unique artiste, en dehors de leur proposition habituelle. Le public cible est constitué d’institutions. Je pense aussi que les galeries ont remarqué qu’il y a désormais davantage de jeunes collectionneur·euse·s averti·e·s en Asie. Les galeries savent que si elles veulent nouer de vrais liens avec ce public, elles doivent avoir une approche curatoriale. Concernant les présentations, je pense que celles connectées à la diaspora asiatique ont pris davantage de place depuis la pandémie. Par exemple, Kim Lim, représentée par la galerie STPI à Singapour, est une figure historique importante parmi les artistes féminines asiatiques. Elle était active au Royaume-Uni dans les années 1960. Martin Wong, présenté par la galerie PPOW de New York, est également très intéressant – un peintre américain d’origine chinoise dont le travail abordait les communautés queer et qui a toujours été suivi par les collectionneur·euse·s asiatiques. Silverlens, une galerie qui a commencé à Manille et a ouvert un second espace à New York, présente James Clar, un artiste américano-philippin qui s’est récemment installé aux Philippines.

Qu’est-ce que cela dit selon vous de l’évolution de l’art contemporain en Asie ?

Lorsqu’Art Basel s’est installée à Hong Kong il y a 12 ans, c’était dans un contexte où l’on apprenait encore la manière dont fonctionnait le monde de l’art contemporain en Occident. Cependant, après la pandémie, nous constatons qu’il y a beaucoup d’échanges et que les choses ont évolué, avec des Asiatiques qui s’établissent à travers le monde et une diaspora asiatique qui revient en Asie.

Vous avez mentionné une génération plus jeune de collectionneur·euse·s plus averti·e·s en matière d’art contemporain. Comment la foire favorise-t-elle ces profils ?

Au sein de la foire, nous avons cette année souhaité une ambiance plus jeune, et un environnement plus vivant, avec des espaces de type speakeasy et des bars à nouilles. Nous voulons que les jeunes collectionneur·euse·s comprennent qu’Art Basel Hong Kong n’est pas seulement prestigieuse et sérieuse, mais aussi très ouverte d’esprit et passionnante.

La commande faite par Art Basel à l’artiste singapourien Ho Tzu Nyen pour la façade du musée M+ semble être un bon exemple de l’évolution de la foire, dans le sens où elle réinterprète les représentations cinématographiques classiques de Hong Kong et évoque la place de la ville dans un imaginaire culturel plus large.

Exactement. Il peut y avoir une frontière très mince entre ce que les artistes font avec l’image en mouvement et ce qui se passe dans l’industrie cinématographique. Cette commande est un moyen pour nous de sensibiliser le public. Cette œuvre peut être vue par toutes et tous sur la façade de M+ depuis le port de l’île de Hong Kong. Nous collaborons également avec une institution locale, Tai Kwun, pour une soirée d’artistes, avec des performances, des installations en direct et des DJ. Nous avons aussi un nouveau partenaire culturel – Design Trust, une organisation à but non lucratif qui se concentre sur l’architecture, le patrimoine, le design et la technologie.

Enfin, qu’attendez-vous avec le plus d’impatience ?

J’attends avec beaucoup d’enthousiasme le projet de Monster Chetwynd. Ses œuvres, souvent créées in situ, relèvent d’un processus de réalisation complexe et comprennent de nombreux éléments performatifs. Personne ne pouvait imaginer ce que l’œuvre pourrait être en réalité. Je pense que plus de la moitié des œuvres du secteur Encounters [le focus de la foire sur les grandes installations] ont été créées spécifiquement pour Hong Kong. Nous avons deux jours pour réaliser ces installations à grande échelle au sein de notre espace d’exposition. Je suis très enthousiaste de voir comment Para Site [l’institution artistique majeure de Hong Kong connue pour soutenir les curateur·rice·s émergent·e·s] a organisé notre programme de films, qui se concentre sur les artistes de Hong Kong. Nous visons toujours à soutenir les jeunes talents, en particulier ceux de notre propre ville.

Crédits et légendes

Art Basel Hong Kong se déroulera du vendredi 28 mars au dimanche 30 mars. Plus d’informations ici.

Traduction française : Art Basel.

Skye Sherwin est une rédactrice d'art basée à Rochester, au Royaume-Uni. Elle collabore régulièrement au Guardian et à de nombreuses publications artistiques.

Légende de l'image et de la vidéo en pleine page, de haut en bas : 1. Angelle Siyang-Le. 2. Vue de Hong Kong, 2023. Vidéo de Luke Casey pour Art Basel.

Publié le 5 mars 2025.