Jesse Darling, VANITAS, 2024

Présenté par Arcadia Missa, Chapter NY, Molitor et Sultana

Né en 1981 à Oxford, vit et travaille à Oxford

Pour VANITAS (2024), Jesse Darling détourne des barrières de protection en métal en les tordant, les étirant, les déformant. Habituellement utilisées pour limiter la liberté de mouvement, l’artiste y voit des symboles de division et de contrôle. En les malmenant, il révèle les vulnérabilités du pouvoir qu’elles représentent. Après avoir été présentée au prix Turner à Londres en 2023 sous le titre Come On England, l’installation est accompagnée à Paris par les vitrines de son œuvre phare Still Life (2017-en cours), contenant des fleurs appelées à se faner. Ainsi réinterprété, le projet se fait la critique de la privatisation et de l’exclusion économique, soulignant la manière dont les structures du pouvoir, mais aussi les cycles naturels de la vie sont inéluctablement soumis au déclin et au changement

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Audioguide

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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre

Artiste pluridisciplinaire, le sculpteur britannique Jesse Darling vit et travaille à Berlin. Sonoeuvre éclectique, traduisant un effondrement physique et social, a été récompensée en 2023 parle Turner Prize décerné par la Tate Britain à Londres. Pour l’exposition Vanitas, trois installations sont regroupées dans la nef centrale du Petit Palais : Still Life (2017), Common England (2023) et The Big Dipper (2023).

L’installation monumentale Still Life est composée d’une vingtaine de vitrines renfermant des fleurs installées quatre jours avant le vernissage. Cette oeuvre, directement inspirée des représentations de natures mortes du XVIIe siècle, est appelée à disparaître durant la semaine de l’exposition. Les fleurs asphyxiées par leur environnement reflètent l’aspect éphémère et inéluctable de la vie. Le visiteur de l’exposition peut ensuite observer l’oeuvre Common England qui regroupe deux barrières de protection en acier rendues bancales. L'oeuvre dialogue dans l’espace avec The Big Dipper, un haut rail en acier courbé trouant le mur et rampant sur le sol. Dans ces deux installations, il choisit de manipuler des matériaux ordinaires traçant des lignes minimales, tantôt courbes et harmonieuses, tantôt brisées et saccadées, conférant une certaine poésie à des objets du quotidien sur lesquels le regard ne s’arrête pas habituellement. 

En faisant dialoguer la fragilité des fleurs colorées et la froideur industrielle du métal déformé, l’artiste questionne la place du corps étouffé dans la société contemporaine. Les barrières de métal, utilisées en temps normal pour contraindre la mobilité, sont ici malmenées et agrémentées de roulettes. Ces structures, d’ordinaire inébranlables, transmettent un sentiment d’effondrement et de fragilité, symbolisant le délitement possible du contrôle des autorités politiques et sociales.

De plus, le contraste entre les structures métalliques brutalement détournées et les fleurs questionnent la notion d’oeuvre d’art même. En effet, en réunissant Common England et The Big Dipper, Jesse Darling bouscule le cadre muséal par l’interaction d’objets industriels et d’éléments naturels présents dans Still Life. Il ne cherche pas à valoriser le rendu esthétique de ses oeuvres et affirme qu’il cherche à “défendre les choses et les personnes cassées, dont [il fait] probablement partie” (Jesse Darling cité par E. Lebovici, “Jesse Darling & Nanténé Traoré”, Numéro art, 14, 3 octobre 2024). 

Ainsi dans l’exposition Vanitas, Jesse Darling pense, à travers une poésie de fleurs et de barrières d’acier, la fragilité de la vie humaine, mais aussi celle de sa propre existence au sein d’une société instable qui menace de s’effondrer.

Solenn BRIGANT, Eva GROUSSIN et Lena VAYSSE