Ghada Amer, Paravent Girls: Suzy Playing, Jennifer and Barbara, L’Étonnement d’Amélie, 2021-2022
Présenté par Tina Kim Gallery, Marianne Boesky Gallery et Goodman Gallery
Née en 1963 au Caire, vit et travaille à New York
Dimensions variables
Bronze coulé à la cire perdue avec patin
Dans ses peintures, sculptures et broderies, Ghada Amer dépeint des femmes à l’érotisme assumé afin de renverser les notions d’objectification et de visibilité. Les Paravent Girls sont nées sous la forme de boîtes en carton sur lesquelles Ghada Amer a dessiné des visages, dont elle a ensuite fait des moules en argile pour les fondre en bronze. Striées de rainures, les sculptures conservent une part de leur forme originelle. Agissant comme des paravents protégeant des regards, ses œuvres nous invitent à réfléchir sur la frontière entre vie privée et vie publique.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
Ghada Amer est une artiste égyptienne née en 1963 au Caire. Elle a effectué ses études d’art à la Villa Arson, à Nice, et travaille aujourd’hui à New-York. Ses oeuvres sont d’abord caractérisées par l’association de la peinture et de la broderie, puis, l’artiste s’intéresse aux techniques de la sculpture et de la céramique. Ghada Amer développe un discours féministe dans son art. Elle interroge la place des femmes dans la société contemporaine en utilisant leurs corps comme motifs dans la plupart de ses réalisations. Les Paravent Girls constituent ses premiers travaux en bronze, et manifestent une nouvelle avancée dans sa pratique artistique.
Ces sculptures en bronze fonctionnent comme une série de panneaux évoquant trois paravents ornés sur chaque côté de visages de femmes en bas-relief.
Ces oeuvres sont réalisées à partir de boîtes en carton dépliées sur lesquelles l’artiste peint des images de femmes issues de revues pornographiques. Au fur et à mesure du tracé, la peinture créée des coulures que l’artiste immortalise en les modelant, ainsi que les contours des dessins, avec de l’argile. Le tout est ensuite moulé dans du bronze grâce au procédé de la fonte à la cire perdue. Les oeuvres obtenues ainsi conservent la matérialité et la forme du carton, ainsi que la disposition sur la tranche, ce qui permet d’y voir une série de paravents.
Dans l’interprétation de l’artiste, le paravent est un objet possédant des connotations érotiques. L’objet cache une scène intime au regard tout en la suggérant. Cependant ici, au lieu de dissimuler, Ghada Amer choisit de révéler ces scènes, inscrites sur les parois, détournant ainsi l’objet. Ces images, hors de leur contexte, ne présentent que les portraits des femmes. L’accent est mis sur leurs regards, parfois rivés sur le spectateur ou bien l’évitant, l’invitant ou non à participer. Ces scènes ne sont pas identifiables à de la pornographie. En effet l’artiste souhaite mettre en valeur l’expressivité des femmes plutôt que leurs corps, et inverser ainsi la tendance de leur média d’origine qui les réduit à de simples objets de désir et de contemplation pour le regard masculin. L’artiste, en se réappropriant ces modèles, interroge la sexualité féminine et le regard que la société y appose, dans une perspective féministe, pour faire prendre conscience au spectateur de ses biais.
Avec cette série, Ghada Amer construit un discours encourageant les femmes à se réapproprier et assumer leur image, leur corps et leur sexualité.
Siona Samoian et Enora Vauterin
César, Pouce, 1965-1988
Presented by Almine Rech
Né en 1921 à Marseille, décédé en 1998 à Paris
350 x 200 x 142 cm
Bronze
Figure clé du nouveau réalisme, César recontextualisait des objets du quotidien en tant qu’œuvres d’art. Célèbre pour ses compressions en métal, notamment de voitures, il commence à travailler le plastique et la résine dans les années 1960 avec la série « Pouce » qui reprend le moulage de son propre doigt. Après une première version de l’œuvre de 40 cm réalisé en plastique qui faisait déjà apparaître chaque détail de la peau, il développe diverses versions de cette œuvre, de tailles et matériaux variés, dont le polyester et le cristal, ou encore ici le bronze.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
César Baldaccini (1921-1998) entre à l’École des Beaux-Arts de Paris à la fin des années 1940. Il y rencontre Picasso, Giacometti, Gargallo, qui l’introduisent aux idées avantgardistes. Au tournant des années 1960-1970 l’expressionnisme abstrait s’essouffle, comme le théorise Pierre Restany en affirmant “Nous assistons aujourd'hui à l'épuisement et à la sclérose de tous les vocabulaires établis, de tous les langages, de tous les styles” (Pierre RESTANY, Les nouveaux réalistes, 16 avril 1960). Dans ce contexte, le nouveau réalisme se pose comme une nouvelle possibilité pour l’art, reprenant les codes de l’industrie et du divertissement, dans une volonté de s’approprier le réel. L'oeuvre du Pouce se rattache à cette période artistique à travers la série des “Empreintes humaines” débuté dans les années 1965.
Cette sculpture en bronze de grande dimension (350 x 200 x 142 cm) est réalisée à partir d’un moulage du propre doigt de l’artiste. Isolé de la main, le Pouce s’élève dans une verticalité monumentale qui contraste avec le naturalisme de sa représentation. Les rides, scrupuleusement reproduites, trahissent l’âge de l’artiste qui devait avoir entre 50 et 60 ans. Au sommet, l'ongle se démarque par sa surface polie. Tel un miroir, il capte les effets de lumière et reflète le spectateur, attestant de la préciosité du matériau.
À travers ce Pouce, César défie les conventions de la sculpture classique. L’artiste débute les essais de moulage corporel en 1963 au moment de la préparation d’une exposition sur le thème de la main, de Rodin à Picasso, dans la galerie de Claude Bernard. Il fait le choix d’une technique dite de “non intervention” c’est à dire uniquement par un moulage du sujet et non par la taille de la matière. Le moulage lui permet de travailler divers matériaux tels que les plastiques ou le cristal mais aussi sur différentes échelles. En effet, il agrandit ses modèles par la technique du pantographe, un processus innovant de report de mesure. La matière est au coeur de la recherche du sculpteur, qui par sa déclinaison en série devient le sujet même de l'oeuvre.
Le Pouce est le symbole du travail manuel, caractéristique de l’artiste. Il est ici un hommage à ce membre créateur qui l’a accompagné durant sa carrière et devient oeuvre d’art lui-même. Il est révélateur du souhait de César d’inscrire littéralement son empreinte dans l’histoire de l’art, de laisser une trace de son inventivité et de sa radicalité.
Manon DE MAISTRE
Xin SHAN
Amilcar de Castro, Untitled, 1990
Présenté par Galeria Marilia Razuk, Almedia & Dale
Né en 1920 à Paraisópolis, décédé en 2002 à Belo Horizonte
98 x 100 x 74 cm
Acier
Au début de sa carrière Amilcar de Castro, graphiste brésilien, composait des maquettes pour des journaux et magazines. Son talent pour la mise en valeur de surfaces planes s’est ensuite naturellement transposé à la sculpture. La technique « one cut, one fold » (« une découpe, un pli ») devenue sa signature, consiste à couper et tordre des feuilles de métal sans ajouter, retirer, ni souder quelque matériau que ce soit. C’est avec grâce que les formes minimalistes ainsi créées évoluent dans le temps, la rouille et le vieillissement de la texture faisant partie intégrante de l’œuvre.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
« Les peintres voient le monde à travers la couleur. Je suis sculpteur. Je vois le monde à travers les lignes. » (Carnets d’Amilcar de Castro)
Né en 1920 à Paraisópolis au Brésil, Amilcar de Castro est un artiste majeur du XXème siècle en Amérique du Sud. Il intègre la Escola de Belas Artes de Belo Horizonte en 1944 où il reçoit une formation artistique académique. Graphiste, maquettiste, peintre, il se concentre ensuite sur la sculpture à partir des années 1960 et s’inscrit dans le néo-concrétisme brésilien. Ce mouvement débute par un manifeste en 1959 et se fonde sur l’abstraction géométrique inspirée des mouvements Bauhaus et De Stijl, tout en ajoutant une portée sensorielle et poétique. La série de sculptures One Cut, One Fold est l’aboutissement des recherches de l’artiste autour de la ligne et de l’espace. Il s’y consacre majoritairement jusqu’à la fin de sa vie en 2002.
Ces trois sculptures d’environ un mètre de hauteur sans socle sont issues de cette série. A partir de plaques d’acier rectangulaires, l’artiste propose trois formes tridimensionnelles. La première est pliée et découpée en diagonale en son centre. La deuxième est découpée au milieu et l’un des deux côtés est plié. Enfin, la dernière sculpture semble découpée à deux endroits vers l’avant tandis que la courbure se dirige en arrière. Chaque sculpture est ainsi régie par un travail de lignes unique créé par un pli et une découpe. L’acier brut est rongé par la rouille, leur donnant une couleur brune.
Les sculptures ont été réalisées selon la méthode de travail spécifique à la série, qui consiste à travailler le matériau en réalisant seulement un pli et une découpe. Chaque oeuvre propose plusieurs jeux de contrastes. D’une part, la lourdeur du matériau s’oppose à l’impression de légèreté créée par l’équilibre des plis et des courbes. D’autre part, des jeux d’ombre et de lumière sont permis par l’alternance entre les pleins et les vides de la matière. Tous ces contrastes confèrent à la sculpture pourtant massive un aspect dynamique.
Lorsque les oeuvres sont achevées, Amilcar de Castro considère qu’elles débutent une vie autonome. En effet, l’artiste désire exposer ces oeuvres en extérieur. Posées à même le sol, les sculptures sont directement accessibles au public qui peut tourner autour, s’approcher et se l’approprier. La multiplicité des points de vue possibles participe au dynamisme de l’oeuvre, notamment la découpe qui offre une ouverture sur le paysage du Domaine national du Palais-Royal. En ne traitant pas l’acier, l’oxydation et l’usure des oeuvres deviennent l’aboutissement de cette rencontre entre l’oeuvre et son environnement, selon l’artiste qui souhaite l’inscrire dans le temps.
Coline Duthoit
Héloïse Mascarin
Richard Long, Gold Rush, 2006
Présenté par Sperone Westwater
Né en 1945 à Bristol, vit et travaille à Bristol
25 x 792.5 x 640.1 cm
Granit
Richard Long est un sculpteur britannique connu pour sa pratique du land art. Reflétant sa conviction que l’art peut naître des éléments les plus ordinaires, ses installations retracent ses déplacements à travers une diversité de paysages pour composer des œuvres avec des matériaux naturels tels que les pierres, la boue ou l’eau. Créé à l’origine pour son exposition au San Francisco Museum of Modern Art en 2006, Gold Rush est une installation triangulaire de pierres en granit trouvées par l’artiste dans une ancienne mine du massif montagneux de la sierra Nevada, en Californie.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
Richard Long (né en 1945 à Bristol) est reconnu comme étant l’un des principaux représentants anglais du Land Art. Ce mouvement propose une forme d’art s’échappant des configurations traditionnelles et du monde des institutions artistiques, en érigeant l’oeuvre au coeur de la nature. La démarche de l’artiste consiste à prélever des éléments dans la nature ou à effectuer des marches performatives, considérant sa trace comme étant un acte artistique au sein du milieu naturel, comme dans son oeuvre fondatrice A Line Made By Walking (1967).
Créé à l’origine pour son exposition au San Francisco Museum of Modern Art en 2006, Gold Rush est une installation triangulaire de morceaux de granit posés au sol, pierres trouvées par l’artiste dans une ancienne mine de la Sierra Nevada californienne. L'oeuvre possède une grande superficie (25 x 792,5 x 640,1 cm), qui joue un rôle crucial dans l’impact visuel et émotionnel sur le spectateur.
A proximité de l’oeuvre, le spectateur est submergé par la matérialité et le poids des pierres. Cette monumentalité incarne la force de la nature tout en rappelant la fragilité de l’homme. Les dimensions triangulaires de l'oeuvre évoquent non seulement les montagnes (comme celles de la Sierra Nevada), mais aussi les pyramides ou les constructions monumentales, qui peuvent être interprétées comme le manifeste de la puissance de l’homme sur la nature (ou de la soumission des éléments naturels par l’homme). Cependant, ici, l'absence d’artifice ou de finition soignée (les pierres sont laissées brutes et non taillées) souligne une connexion authentique avec le sol et les ressources naturelles.
Le titre fait référence à la Ruée vers l’or, épisode marquant de l’histoire américaine au XIXe siècle, qui a incité des milliers de personnes à migrer vers l’Ouest américain, attirés par l’illusion de richesse et de prospérité. Cet épisode de l’histoire est indissociable des conséquences qu’il a engendrées, notamment l’exploitation intensive des ressources naturelles ou encore les luttes pour le contrôle des terres. En prélevant des pierres d’une mine californienne, Richard Long ancre son oeuvre dans ce contexte chargé d’histoire, interrogeant les implications de l’exploitation minière et le rapport complexe que l’homme entretient avec la nature.
Les couleurs des pierres, qui peuvent rappeler les nuances de l’or, soulignent l’illusion de richesse et la superficialité de la quête matérielle. En utilisant un matériau brut, Long nous invite à reconsidérer ce qui est véritablement précieux. Dans un monde où la valeur économique est souvent attribuée à des objets manufacturés, l'artiste suggère que la beauté et la valeur peuvent également résider dans la simplicité des éléments naturels.
Anas TOUZANI
Gauthier SCHMITT
Thomas Schütte, Tribute to Moondog, 2024
Présenté par Peter Freeman, Inc.
Né en 1954 à Oldeburg, vit et travaille à Düsseldorf
220 x 90 x 100 cm
Bronze patiné sur socle en acier par l’artiste
Ce buste rend hommage à Moondog, un musicien, artiste et poète non-voyant connu pour ses tenues excentriques inspirées des vikings et son appartenance à la scène underground new-yorkaise. Créée à partir d’un moulage à la cire perdue, la sculpture est une nouvelle version de Hund III (2004) de l’artiste : une approche caractéristique de sa méthode qui consiste à revenir sur ses propres créations. Sa présence à Paris est un clin d’œil aux liens étroits qu’entretenait Moondog avec la capitale française à la fin de sa vie.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
Thomas Schütte est un artiste allemand né à Oldenburg (RFA) en 1954 et reconnu pour sa pluridisciplinarité. En 1973, il se forme aux Beaux-Arts de Düsseldorf et se met progressivement à distance des grands mouvements artistiques de son temps, soit l'art minimal et l'art conceptuel. Il appartient à une nouvelle génération d’artistes qui souhaite renouveler la figuration. Ainsi, il emploie différents matériaux, autant traditionnels tels l’argile, la céramique ou le bronze, que modernes, comme l’impression 3D.
En sculpture, l’artiste est fasciné par la représentation humaine. Il explore la psychologie et le comportement des individus dans la société contemporaine pour s'intéresser à la période dans laquelle il s’inscrit.
Tribute to Moondog (2024) représente un buste de chien aux oreilles dressées. Ce motif est déjà présent dans l’Oeuvre de Schütte qu’il développe notamment avec sa série « Hunde » (2003-2022). En effet, l’artiste utilise plusieurs fois le même moule, pour perfectionner son modèle dans le temps. La forme du chien est ainsi renouvelée au fil des différentes oeuvres qui lui confèrent symboliquement une nouvelle vie. Ici, elle appartient à une nouvelle histoire en devenant un buste en hommage à Louis Thomas Hardin (1916-1999) Ce dernier était un musicien américain, aveugle, sans-abri, compositeur autodidacte prolifique connu sous le pseudonyme de Moondog. Véritable figure de l’underground new-yorkais des années 60-70, il affirmait son identité en faisant référence à la culture et la mythologie nordique dont il est passionné. En effet, il arbore une tenue de viking comme signature artistique et a choisi d'utiliser son surnom en référence à Hati, le loup qui poursuit la lune.
Ainsi, Thomas Schütte ne représente pas directement Louis Thomas Hardin mais, par un chien, l’incarnation de son pseudonyme. Le travail du bronze pour représenter le pelage de l’animal, traité avec irrégularité, évoque la surface de la Lune. Enfin, en disposant au niveau de ses yeux une paire de lunettes, l’artiste teinte son oeuvre d’une pointe d’ironie faisant référence à la cécité du musicien.
Cette année, Thomas Schütte célèbre ses soixante-dix ans et le Museum of Modern Art (New York) lui consacre une rétrospective mettant en valeur son travail polymorphe. Architecte, dessinateur, peintre, sculpteur, depuis son immersion dans le monde de l’Art et jusqu'à aujourd'hui, il défie tous les genres pour les revitaliser et les transformer en témoins de son présent.
Hippolyte Ammou et Léa Favier
Roberto Sebastian Matta, Matta’s Tribal Sculptures, 1991-2009
Présenté par Galleria d’Arte Maggiore G.A.M.
Né en 1911 à Santiago, décédé en 2002 à Civitavecchia
Dimensions variables
Bronze
Architecte de formation, Roberto Sebastian Matta a rejoint le mouvement surréaliste à Paris, où il a collaboré avec d’autres artistes majeurs avant de développer son style propre, caractérisé par une imagerie onirique et des thèmes psychologiques. Cette sélection de sept sculptures en bronze datant des années 1990 se fait l’écho de l’héritage latino-américain et des influences européennes de l’artiste. Assemblées ici, elles évoquent des totems tribaux peuplant une contrée imaginaire et spirituelle.
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Notice rédigée par les élèves de l'École du Louvre
Roberto Sebastian Matta est un artiste chilien né en 1911 et mort en 2002 en Italie. Pendant son séjour à Paris entre 1932 et 1939, il rencontre André Breton, et rejoint ainsi le mouvement surréaliste. A partir de 1939, Matta voyage autour du monde, et découvre de nombreuses cultures, étrusque, précolombiennes, celtiques, entre autres. Celles-ci inspirent sa production artistique. Il travaille plus particulièrement à la fin de sa carrière sur une série de totems.
Ces sept sculptures en bronze représentent des créatures hybrides avec des caractéristiques aussi bien anthropomorphes que zoomorphes. En effet, certaines possèdent des jambes et des bras, portent des casques, des armures ou des parures. D’autres sont constituées d’éléments rappelant des cornes, des crocs ou des griffes. La verticalité et la frontalité de ces sculptures accentuent leur hiératisme, évoquant ainsi la forme du totem. La schématisation globale des créatures manifeste une inspiration des cultures précolombiennes. Matta considère ces-dernières comme ses racines. Notamment, les motifs circulaires visibles sur les oeuvres font référence aux motifs solaires issus de la culture Inca.
L'artiste a également emprunté les traits du visage des figurines votives issus de la culture étrusque, observées lors d’un voyage à Tarquinia en 1967.
Le sens de leur assemblage demeure flou et énigmatique pour le spectateur. Ces oeuvres sont ainsi caractéristiques du surréalisme et plus largement d’un goût très prononcé pour les artistes du XXe siècle pour les arts dits “primitifs”. Le totem revêt une certaine importance pour Matta, au-delà de la référence aux cultures précolombiennes. Pour celles-ci, un totem est un élément signifiant, souvent animalier qui caractérise une divinité souvent associée à un ancêtre mythique d’une communauté. L’artiste reprend ainsi la forme du totem comme une passerelle entre le monde visible et le monde invisible.
En tant que surréaliste, Matta associe ce dernier à l'inconscient, aux rêves et à son propre imaginaire proposant ainsi un ensemble d’oeuvres syncrétiques.
Ces oeuvres de fin de carrière de Matta condensent l’ensemble la vie de l'artiste, de ses origines jusqu'à ses voyages. Ces totems, bien que difficiles à comprendre précisément, reflètent aussi une dimension plus guerrière avec les casques et armures, non sans lien avec les conflits qui ont marqué le XXe siècle et l’artiste.
Blanck Maxence et Billerot--Mauduit Raphaëlle