<p>Dans le cadre d'une commande d'Audemars Piguet Contemporary, Andreas  Angelidakis s'inspire de l'ancien temple de Zeus pour transformer  l'architecture moderniste de l'Espace Niemeyer</p>

Janelle Zara

À Paris, une nouvelle installation immersive joue avec les formes archéologiques anciennes 

<p>Architecte de formation, l'artiste grec Andreas Angelidakis, basé à Athènes, étudie l'architecture antique, y voyant un moyen de revisiter notre perception contemporaine du monde. En octobre, il présente « Center for the Critical Appreciation of Antiquity », une commande d’Audemars Piguet Contemporary. L’installation est&nbsp;inspirée&nbsp;par l’Olympiéion, le temple&nbsp;de Zeus olympien à Athènes. Sous le dôme de béton blanc de l'espace Niemeyer, réalisé en 1965 par l'architecte Oscar Niemeyer pour le siège du Parti communiste français, l'artiste a conçu une installation immersive et créative reprenant les éléments architecturaux du temple antique : Andreas Angelidakis les réinterprète à travers des vidéos, des sculptures souples ou encore du mobilier, proposant ainsi une expérience ludique et inédite de l'archéologie grecque.</p>

<p>« L’installation, à la fois chantier de fouilles et de construction, constitue un espace hybride qui permet au public d’expérimenter physiquement son environnement », explique Denis Pernet, commissaire chez Audemars Piguet Contemporary, en décrivant les colonnes sculpturales, qui peuvent être converties en meubles et sont au cœur de l'exposition.</p><p>« Ce qui a notamment attiré Audemars Piguet Contemporary vers la pratique d'Angelidakis est qu'elle offre de nombreuses strates et points d'entrée pour différents publics », ajoute-t-il. « Vous pouvez littéralement jouer dans l'espace. » Avant sa première exposition personnelle à Paris, nous avons échangé avec Andreas Angelidakis à propos des ruines dans l'imaginaire populaire à l'ère du numérique et de la manière dont l'histoire est constamment réécrite.</p>

<p><strong>Janelle Zara : Votre point de départ était le temple de Zeus olympien à Athènes, dont l'architecture est fondamentalement à l'opposé de celle de l'espace Niemeyer – ce sont les textures et la majesté d'un lieu sacré antique contre l'efficacité épurée du modernisme. Qu'est-ce que ces bâtiments avaient à se dire ?</strong></p><p><strong>Andreas Angelidakis :</strong> C'est lors des échanges menés dans le cadre d'Audemars Piguet Contemporary que l'espace Niemeyer a été évoqué. C'est en fait Denis qui a suggéré ce lieu, et c’était une évidence. En tant que moderniste brésilien des années 1960, Niemeyer, à travers son architecture de sensualité et de design total, a imaginé un avenir qui ne s'est jamais réalisé. Aujourd'hui, les bâtiments qui accueillent nos services publics ne ressemblent à rien de tout cela. Par ailleurs, l'histoire du temple de Zeus est emplie de subjectivité, l'archéologie présentant sa propre version du passé. En associant un avenir qui ne s'est jamais concrétisé et un passé qui a pu être différent, nous créons une sorte de vortex énergétique.</p>

<p><strong>Il est important de noter que votre installation s’intitule « Centre pour une appréciation <em>critique</em> de l'antiquité ».</strong></p><p><strong></strong></p><p>Ma pratique générale consiste à offrir un point de vue critique sur des notions établies. Disons que le « Center for the Critical Appreciation of Antiquity » [Centre pour une appréciation critique de l’antiquité, ndlr] avait pour objectif de se pencher sur le Parthénon de l'Acropole. Quelque chose qui m'a vraiment fasciné, c’est la présence d’une mosquée datant de l’Empire ottoman à l’intérieur du Parthénon –chose que vous n’êtes pas censé∙e savoir. Les archéologues ont fait le choix de dissimuler la mosquée plutôt que de la présenter dans une perspective historique critique, sachant que la Grèce a fait partie de l'Empire ottoman pendant 400 ans. Cette partie de l'histoire ne peut pas être évoquée. Alors je pose la question : pourquoi cacher la mosquée ? C'est le genre de pensée critique qui s’applique parfaitement au cas du temple de Zeus. Il est considéré comme un monument du passé, mais il a été détruit par des incendies, reconstruit et redécoré par divers empereurs, rendant son histoire infiniment plus complexe.</p><p><strong>Vous avez, par le passé, décrit votre démarche comme un<em> queering</em> de l'espace.</strong></p><p>C'est un <em>queering </em>de l'espace, car cela consiste à présenter de fausses antiquités dans une sorte de futur accompli et en apportant un point de vue différent. Il ne s'agit pas de juger le passé avec les normes d'aujourd'hui, mais de le comprendre. J'utilise le temple comme un vaisseau ou un cheval de Troie : il me permet d’aborder d’autres sujets.</p>

<p><strong>Denis Pernet a décrit l'exposition comme un espace hybride entre chantier de fouilles et de construction, et centre d'étude. Pouvez-vous nous expliquer à quoi cela va ressembler, ce que vous souhaitez que les gens ressentent ?</strong></p><p>Nous créons une atmosphère que les visiteur∙euse∙s auront du mal à définir. Est-ce que les gens étudient ici ? Est-ce le jour ou la nuit ? L'espace oscille entre un site archéologique, une boîte de nuit et un centre d'étude, uniquement en ajustant l'éclairage. Cela fait référence au fait que l'esthétique propre à l'architecture grecque a été utilisée aussi bien dans des bars gays que des discothèques de bord de mer, en passant par des musées et des parlements. Mais ne vous attendez pas à venir là pour étudier !&nbsp;</p>

<p><strong>Au cœur de l'expérience, il y a votre nouvelle installation de meubles sculpturaux. Quelle a été votre approche du point de vue de la conception et de la construction, et comment cela contribue-t-il à l'interaction des visiteur∙euse∙s ?</strong></p><p>L'exposition se veut immersive, une expérience au cours de laquelle les visiteur∙euse∙s verront un vaisseau spatial constitué de fausses antiquités sur lesquelles iels pourront s'asseoir, qu'iels pourront réorganiser. Des textes ont été écrits pour l'exposition et seront publiés sous la forme d'une chaise – imaginez un livre qui soit en fait un fauteuil, avec des pages que vous pouvez tourner. Le mobilier fait partie d'une série plus large appelée « Soft Ruins », qui est en mousse avec une couverture imprimée numériquement. C'est tout un système conçu pour un moine stylite du début de l'Empire byzantin, qui vivait au sommet d'un pilier. Mais si le moine souhaitait davantage de confort, voulait s'asseoir plutôt que de se tenir debout, il pouvait démonter l'installation pour en faire un canapé, un lit, un bureau, une bibliothèque ou un fauteuil. Les meubles sont tout doux et légers, et vous pouvez jouer avec eux. La série traite en fait l'archéologie comme un jeu. C'est un environnement qui joue un peu avec les frontières entre ce qui est une exposition et ce qui ne l'est pas. Si vous pouvez déplacer les œuvres d'art, faites-vous partie de l'exposition ?</p>

<p>Janelle Zara est une auteure indépendante spécialisée en art et architecture. Elle a publié <em>Becoming an Architect (Masters at Work), </em>Simon &amp; Schuster, 2019<em>.</em> Janelle Zara est basée à Los Angeles.</p><p>« <a href="https://www.audemarspiguet.com/com/en/news/art/andreas-angelidakis-center-for-the-critical-appreciation-of-antiquity.html">Center for the Critical Appreciation of Antiquity (2022)</a> » d’Andreas Angelidakis sera à découvrir du 11 au 30 octobre 2022. </p><p>Commissionnée par Audemars Piguet Contemporary, l’installation transforme l’intérieur du dôme de l’historique espace Niemeyer, à Paris. Il s’agit de la première exposition monographique de l’artiste et de la première œuvre commissionnée par Audemars Piguet Contemporary dans la capitale française. </p><p>Andreas Angelidakis, DeForrest Brown Jr., et Isabel Lewis ont participé au programme des&nbsp;Conversations de Paris+ par Art Basel&nbsp;pour une discussion intitulée «&nbsp;<a href="https://www.artbasel.com/stories/conversations-paris--par-art-basel-2022-rave-new-world">Rave New World: Clubbing, Art and Resistance on the Metropolitan Edges</a> ». Le débat était animé par le curateur hollandais Bart van der Heide (Museion, Bolzano, Italie).</p><p>Traduction française : Henri Robert</p><p>Légendes des images en pleine page&nbsp;: 1. Andreas Angelidakis. &copy; Dimitri Bourriau, Espace Niemeyer. 2. Studio d'Andreas Angelidakis. Photo &copy; Vassilis Karidis. Avec l'aimable autorisation de l'artiste. 3. Andreas Angelidakis, <em>Domesticated Ruin (pink)</em>. Collection privée, Monaco.&nbsp;Avec l'aimable autorisation de l'artiste.</p>

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Andreas Angelidakis draws on the ancient Greek Temple of Olympian Zeus to transform the Modernist Espace Niemeyer in a new commission by Audemars Piguet Contemporary

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